Etoiles (Lazreg Ouadah)
Au soir, Quand bêtes et hommes regagnent leurs gîtes
Les vêpres par leurs murmures envahissent l’horizon de leurs voiles
À travers mon embrasure je me prépare à rencontrer les étoiles
Elles viennent pour essaimer ma voûte, à les accueillir, je me précipite
O mes douceurs, de mon promontoire je vous admire, je vous écoute
Et vous autres senteurs, effluves valéryennes, venez toutes
Hissez à moi vos fraîches bouffées de la rivière qui coule en bas
O vous les étoiles, perles de mon âme, j’aime vos ébats
Inspirez moi, parlez moi, je veux béer
Pour mon cœur endolori miroitez
C’est l’heure de ma paix retrouvée
Je veux m’y plonger et m’y attarder
Au pied de votre palais nocturne
J’ai déposé tous mes tracas, fardeaux engourdissants
Je veux m’enivrer de votre élixir au clair de lune
M’emporter en noctambule errant
Des chants mystiques du temple voisin
Me parviennent, ô Mélodies envoûtantes
Musiques pleines de louanges et reposantes
Dans la nuit paisible avant demain
Rien au monde ne peut assouvir mon esprit
Mes pensées, mon âme et mon être alors épris
Monde féerique des étoiles et de la nuit ma patronne
J’abandonne tous les plaisirs, à celui-ci je m’adonne
Je communie avec le bédouin esseulé sur sa route
Possédant que sa seule monture et quelques gouttes
Grain dans le désert loin du tumulte
Savourant son thé et jouant de son luth
Je sens le marin sur sa barque
Flottant comme une paille dans l’océan
Admirant son étoile paradisiaque
Le guidant assurément
Vous m’apportez la paix la sérénité
Vous me mettez dans l’extase
Rien que vous savez me délecter
Baumes sur mon cœur plein d’angoisse
Myriades jasminées pour mes yeux
Pierres étincelantes de milles feux
Seuls les poètes savent vous parler
Mes amours de chaque soir rencontrés
Vos ballets m’emballent sereinement
Tous beaux et entraînants
La grande et la petite ourse pour mes yeux
L’étoile du berger et la flèche de Zeus
Les autres toutes aimées
Voie lactée
Guirlandes de ma fête
En transe, je m’entête
Les derniers cyprès (Lazreg Ouadah)
Saurez vous m’accompagner à mon trépas
Vous les six cyprès du cimetière Chrétien
Veilleurs sur les pierres en amas
Vous êtes encore là en gardiens
Sentinelles sans relève jusqu’à quand
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Rescapés de l’évident naufrage
Vous êtes les derniers vestiges
D’une ère futile et sans prestige
Qu’ils ont voulu à eux seuls et sans partage
Vous êtes un tableau en résidu, une forte Image
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Autours, croix et ornements disparus
Ni stèles, ni fleurs comme autrefois entretenus
Rien, à sa place, n’est demeuré
Tout a fondu, balayé, oublié
Le cimetière n’est plus visité
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À ma fenêtre, chaque jour, apparaissant
Je ne sais par quelle magie du moment
Vous remuez mes souvenirs bien gardés
Et à cette époque vous me ramenez
Vous ravivez les jours enfouis du passé
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Murmures à mon ouie qui résonnent
D’un temps passé et qui encore fredonnent
Des airs et des rêves d’enfants que nous partagions
Mes rêves à moi que j’ai dessiné au creux de ma main
Longtemps caressés, n’ont pas eu de lendemains
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Décors de pierres et cyprès, étrangers à ce temps
Que vous ne dérangez pas pour autant
Dernières reliques abandonnées maintenant
Ceux d’ici et de là bas, tous, sont indifférents
Moi je m’insurge contre l’insolent abandon
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Quand viendra votre tour, les cyprès
Vous serez abattus, sciés ou brûlés
Quand pour, de bon, vous disparaîtrez
La terre sera alors retournée
Ce qui fut sera à jamais oublié
Sagesse (Lazreg Ouadah)
L’enthousiasme en flots fatals
Bruissaient dans les dédales
De mon esprit fougueux et éperdu
Mon être en fut assez malmené
Il a enfin trouvé sa paix
Ma substance m’a sauvé
Je m’efforce de vivre sagement
A partir de cet instant
Les jours restants
Je veux être tranquille
J’ai enfin pris conscience
De la folie de mes errances
J’ai déjà entamé ma convalescence
Je me suis mis à ma résipiscence
Heureux, je suis indemne
Avoir ce n’est pas être
Posséder c’est être possédé
Le nécessaire est souhaité
Donc juste le nécessaire
Je ne m’embarrasse plus
De ces choses inutiles et superflues
Qui font d’un homme
Voué aux honneurs virils
Une momie aux pieds d’argile
Ces gens qui vont, qui viennent
Qui oublient souvent l’essentiel
Qu’il y à des étoiles dans le ciel
Il n’y à de plus pire aveugle
Que celui qui ne veut voir
Scellé à son noir perchoir
Vus d’ailleurs (Lazreg Ouadah)
Quand on est ailleurs
Dans un espace meilleur
Où tout va plus ou moins bien
Quand on vit dans un autre pays
Où les crimes et les délits
Sont quand même traqués et punis
Quand on ne vit pas dans une fourmilière
Truffée de gens malhonnêtes et pourris
C’est bien commode de voir les choses ainsi
De cette belle manière
Pleine de douceurs et de pardons
Discours se voulant réjouissant
Mots gentils doux comme le sucre
Mots semés au quatre vents
Insensés et à nos ouies si encombrants
Ils ajoutent à nos peines
Leurs poids désolants
La braise est dans les cœurs pleurants
Nos cris sont pour certains esprits
Des divagations d’un autre temps
J’enrage ! Mais que peut ma rage à ce contretemps ?
Il n’y à de plus pire aveugle
Que celui qui ne veut voir
Les étoiles dans le ciel chaque soir
Mes amphigouris embêtent mes amis
En quelques décennies de temps
Nous voilà victimes de la trahison
Je veux inventer une toute autre écriture
Bien supérieure que celle là futile
Efficace, percutante, un dur outil
Une écriture persuasive et éclairante
Qui ne me laissera ni emporter ni éblouis
Par les mots quand je les écris
Un écrivain est connu par ce qu’il écrit
Pas par ce qu’il fait ou par ce qu’il dit
Et moi je déteste les écrivains
Rien n’est simple en notre steppe
Alors que tout devrait l’être
Terrible anathème de nos maîtres
Segment de l’arc en ciel
Qui fut, au pays, un jour ramené
On t’a caché à nous les malmenés
Oh! Que la vie nous enjoint
Souvent, très souvent, des spontanéités
Ephémères envols très vite déjoués
Ordres impérieux de la vie
À la servitude, à l’engluement meurtrier
Ils nous ont asservi à leur sablier
Strates dégoulinantes de mesquineries
Je veux me prémunir contre ces tendances
Je n’ai, pour les fuir, que mes tympans et des espérances
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