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Corneille, Le Cid – Résumé et analyse en vidéo, Lecture audio – Extraits, BAC de français

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Littérature française – Auteurs à connaître au bac de français

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0:00:00 Dissertation Violinne : Résumé et analyse en vidéo

Lecture audio – Extraits :

0:22:15 Acte I, Scène IV – Monologue de Don Diègue (qui laisse éclater son désespoir et sa frustration de ne pouvoir se venger)

0:24:37 Acte I, Scène VI – Monologue de Don Rodrigue (qui exprime son déchirement entre son devoir et son amour)

0:29:04 Acte III, Scène V – Monologue de Don Diègue (qui exprime son désespoir, croyant son fils tué par la vengeance de Chimène)

Présentation

Le Cid est une pièce de théâtre tragi-comique en vers de Pierre Corneille dont la première représentation eut lieu le 7 janvier 1637 au théâtre du Marais.

A l’origine de la pièce se trouve, selon une tradition peu convaincante rapportée par l’historien du théâtre Pierre-François Godard de Beauchamps, une pièce de théâtre de Guillén de Castro Las Mocedades del Cid (Les Enfances du Cid) parue en 1631, qui aurait inspiré le dramaturge français.

Lors de la création, le rôle de Rodrigue était tenu par Montdory qui dirigeait la troupe du Marais, considéré comme le plus grand acteur de son temps. Chimène était jouée par la Villiers, l’Infante par la Beauchasteau, don Sanche par le Montrouge.

Les Personnages : ACTEURS

DON FERNAND, premier roi de Castille

DONA URRAQUE, infante de Castille

DON DIÈGUE, père de don Rodrigue

DON GOMÈS, comte de Gormas, père de Chimène

DON RODRIGUE, amant de Chimène

DON SANCHE, amoureux de Chimène

DON ARIAS et DON ALONSE, gentilshommes castillans.

CHIMÈNE, fille de don Gomès

LÉONOR, gouvernante de l’Infante

ELVIRE, gouvernante de Chimène

Un Page de l’Infante

Résumé

Rodrigue et Chimène s’aiment. Don Diègue et Don Gomès projettent d’unir leurs enfants, mais le comte, jaloux de se voir préférer le vieux Don Diègue pour le poste de précepteur du prince, offense ce dernier en lui donnant une gifle ou « soufflet », dans le langage de l’époque.

Don Diègue est trop vieux pour se venger par lui-même. Il remet sa vengeance entre les mains de son fils Rodrigue qui, déchiré entre son amour et son devoir, finit par écouter la voix du sang et tue le père de Chimène en duel.

Chimène veut renier son amour et le cache au roi, à qui elle demande la tête de Rodrigue. Mais l’attaque du royaume par les Maures donne à Rodrigue l’occasion de prouver sa valeur et d’obtenir le pardon du roi. Plus que jamais amoureuse de Rodrigue qui est devenu un héros national, Chimène reste sur sa position et obtient du roi un duel entre don Sanche, qui l’aime aussi, et Rodrigue. Elle promet d’épouser le vainqueur. Rodrigue victorieux reçoit du roi la main de Chimène et le mariage sera célébré l’année suivante.

Acte I

Scène 1

Au début de la pièce, Chimène, fille du Comte de Gormas, est en pleine discussion avec sa gouvernante, Elvire, qui vient de lui apprendre que Rodrigue, l’amant de Chimène, trouve parfaitement grâce aux yeux du Comte et paraît consentir au mariage de sa fille. Le discours d’Elvire met en exergue la valeur de Rodrigue, semblable à celle que posséda jadis son père. Néanmoins, la vieillesse de Don Diègue, le père de Rodrigue, est également mentionnée, comme une critique implicite. Alors qu’Elivre vient d’annoncer à Chimène que le roi s’apprête à nommer un gouverneur et que son père semble en bonne position pour obtenir ce rang, la jeune femme est prise d’une crainte soudaine, malgré les mots d’Elvire qui tente de la rassurer.

Scène 2

La scène 2 a lieu chez l’Infante, la fille du roi . Elle vient d’envoyer son page quérir Chimène qu’elle doit manifestement rencontrer. Elle révèle alors à Léonor, sa propre gouvernante, son amour irrépressible pour Rodrigue, malgré l’impossibilité d’une telle relation, due au rang de celui-ci, bien trop inférieur au sien. L’Infante révèle alors qu’elle est à l’origine de la rencontre entre Chimène et Rodrigue et qu’elle espère, par leur mariage, voir l’espoir irrépressible qui subsiste en elle disparaître définitivement et cesser d’aimer Rodrigue.

Scène 3

La troisième scène se déroule dans la cour du palais royal. Ici, le Comte de Gormas et Don Diègue sont en pleine discussion, et l’on apprend alors que le choix du roi pour être le gouverneur du prince de Castille s’est porté sur Don Diègue, ce que le Comte ne peut accepter. Laissant éclater sa rancœur et sa jalousie, le Comte se fend d’un discours méprisant et ironique à l’endroit de Don Diègue qui, essayant dans un premier temps de calmer la situation, finit par en prendre ombrage et réplique de manière cinglante au Comte. Ce dernier lui administre alors une gifle. Face à ce qu’il considère comme un affront, Don Diègue se saisit de son épée, mais son grand âge ne lui permet pas de soulever cette dernière, ce qui provoque l’hilarité du Comte qui quitte les lieux.

Scène 4

Le monologue de Don Diègue en 24 vers, qui laisse éclater son désespoir et sa frustration de ne pouvoir se venger.

Scène 5

Quand Rodrigue arrive, Don Diègue lui confie la délicate tâche de défier le Comte en duel, même si le Comte est le père de Chimène. Avant même que Rodrigue ne puisse contester, son père lui rappelle ses devoirs en matière d’honneur qui priment selon lui sur toute autre considération.

Scène 6

Maintenant c’est au tour de Rodrigue de se lamenter sur son sort, dans un monologue de 60 vers, en stances, durant lesquelles il exprime son déchirement entre son devoir et son amour. Au comble du désespoir, il choisit la voie de l’honneur.

Acte II

Scène 1

Cette scène se passe dans une salle du palais royal où le Comte s’entretient avec Don Arias, un gentilhomme castillan. Reconnaissant s’être emporté en gifflant Don Diègue, le Comte de Gormas refuse cependant de calmer la situation en présentant des excuses à celui-ci, malgré l’insistance polie de Don Arias, qui lui restitue les volontés du roi lui-même.

Scène 2

Le Comte est interpellé par Rodrigue qui le provoque en duel et les deux hommes quittent la scène pour leur combat.

Scène 3

Chimène et l’Infante discutent au sujet de la querelle entre le Comte et Don Diègue. L’Infante essaie de modérer les craintes de Chimène, mais Chimène est plus pessimiste. Cette scène est douloureusement ironique pour le spectateur, qui comprend ainsi que, quoiqu’au courant de la querelle, les deux jeunes femmes ignorent que Don Diègue a chargé son fils de provoquer le Comte en duel.

Scène 4

Le page vient les avertir du duel en cours entre Rodrigue et le Comte, ce qui provoque le départ précipité de Chimène.

Scène 5

L’Infante, semblant anticiper le drame à venir, comprend que l’amour entre Chimène et Rodrigue risque d’être gravement compromis par ce duel et que son objectif de voir Rodrigue en épouser une autre pour qu’elle cesse de l’aimer risque d’échouer.

Scène 6

Au palais royal, le roi annonce l’arrivée imminente dans la ville d’une flotte de Maures. Il prend néanmoins la décision de ne pas donner l’alerte, par crainte d’une panique générale.

Scène 7

Don Alonse vient annoncer la mort du Comte et la victoire de Rodrigue. Il indique également l’arrivée prochaine de Chimène qui vient réclamer justice. Le roi paraît alors considérer que le Comte a mérité ce qui lui est arrivé.

Scène 8

Chimène et Don Diègue arrivent alors simultanément, accompagné de Don Sanche, prétendant de Chimène. Dans un discours décousu, que l’une commence et que l’autre achève, Chimène et Don Diègue expliquent au roi leur point de vue et leurs demandes – contradictoires, naturellement. Le roi dit qu’il doit prendre le temps de la réflexion pour rendre sa décision.

Acte III

Scène 1

Elvire a la grande surprise de voir arriver Rodrigue dans la maison de Chimène. Il lui exprime son désespoir. Elvire enjoint Rodrigue à se cacher, alors que Chimène et Don Sanche font leur entrée.

Scène 2

Désireux de se débarrasser d’un rival gênant, Don Sanche tente de convaincre Chimène d’avoir recours au duel pour venger son père et lui propose son propre bras pour ce faire. Chimène refuse, pour attendre la décision du roi, malgré l’insistance de Don Sanche qui s’appuie sur la lenteur de la justice pour tenter de la convaincre.

Scène 3

Après son départ, Chimène révèle à Elvire qu’elle est encore désespérément amoureuse de Rodrigue mais que les raisons d’honneur lui imposent de demander réparation au meurtre de son père, se disant prête à mourir elle-même après la mort de Rodrigue.

Scène 4

Rodrigue, qui a tout entendu, sort de sa cachette et offre de se laisser tuer pour apaiser Chimène. Revenue de la stupeur de voir le meurtrier de son père dans sa propre maison, Chimène réitère son amour à Rodrigue par une litote subtile : Va, je ne te hais point !

Elle comprend que Rodrigue ait choisi l’honneur plutôt que l’amour, elle-même étant sur le point de faire un choix semblable.

Scène 5

Au cours d’un nouveau monologue de 24 vers, Don Diègue exprime son désespoir dans la place publique, croyant son fils tué par la vengeance de Chimène.

Scène 6

Il félicite Rodrigue, mais celui-ci rejette les louanges et reproche violemment à son père la situation dans laquelle la querelle initiale l’a mis.

Don Diègue annonce à Rodrigue l’arrivée des Maures et l’enjoint à prendre le commandement d’une milice de 500 hommes (qui sont arrivés à Séville dans le but de laver l’affront fait à Don Diègue par le Comte, ce qui renforce l’ironie dramatique).

Acte IV

Scène 1

Rodrigue est victorieux et il est fêté en héros. Chimène se reproche de s’en réjouir au lieu de songer à sa vengeance.

Scène 2

L’Infante vient prendre part aux douleurs de Chimène, et lui dit qu’elle ne doit plus demander la mort de Rodrigue, qui est l’unique soutien de l’État face aux Maures. Il suffit, dit-elle, que Chimène lui retire son amour.

Scène 3

Le roi félicite Rodrigue en le nommant « Cid ». La bataille a été sanglante mais la victoire éclatante : deux rois ont été capturés.

Scène 4

Don Alonse interrompt le récit et prévient de la venue de Chimène. Rodrigue se retire. Le roi veut éprouver l’amour de Chimène pour Rodrigue et demande à Don Sanche de prendre un air affligé.

Scène 5

Chimène est encore amoureuse de Rodrigue, mais elle demande un combat qui tranche le différend : Don Fernand fait croire à Chimène que Rodrigue est mort et la regarde défaillir avant de la détromper. Mais elle nie être amoureuse : elle prétend que son malaise était dû à l’excès de joie que lui a causé l’annonce de la mort de son ennemi, puis elle prétend que c’était à cause du déplaisir de voir Rodrigue échapper à sa vengeance. Elle dit regretter que Rodrigue devienne, par cette victoire, intouchable. Elle demande ensuite solennellement au roi la permission de régler la querelle par un duel juridique qui opposera Rodrigue à tout chevalier acceptant de se battre pour elle ; elle s’engage à épouser le chevalier s’il lui obtient la tête de Rodrigue. Don Sanche se propose.

Acte V

Scène 1

Rodrigue vient chez Chimène en secret pour lui dire qu’il a l’intention de ne pas se défendre durant le duel ; il ne saurait vivre si elle veut sa mort. Elle l’exhorte à combattre du moins pour son honneur ; mais face à la persévérance de Rodrigue, elle finit par le supplier ouvertement de remporter le combat pour qu’elle puisse l’épouser au lieu de Don Sanche.

Scène 2

L’infante exprime sa douleur d’aimer sans espoir, dans un monologue. Elle regrette que la mort du comte n’ait pas séparé Rodrigue et Chimène.

Scène 3

Léonor vient réconforter l’Infante en lui expliquant qu’elle ne pourra plus espérer après le combat quelle qu’en soit l’issue (c’est-à-dire que Rodrigue victorieux épouse Chimène ou qu’il meure). Mais les sentiments de l’Infante sont trop forts. Elle décide néanmoins de faire taire son amour et de continuer à favoriser le mariage de Rodrigue et Chimène.

Scène 4

Chimène dit qu’elle se lamentera quelle que soit l’issue du duel, soit sur la mort de son amant, soit sur son affront impuni ; elle devra épouser le meurtrier de son père ou celui de Rodrigue. Elvire lui dit que le Ciel, pour la punir de son obstination à crier vengeance, finira par lui donner Don Sanche pour époux.

Scène 5

Don Sanche vient remettre son épée à Chimène, qui aussitôt croit Rodrigue mort ; elle se répand en imprécations contre Don Sanche sans lui laisser le temps de s’expliquer, dit qu’elle mourra pour venger son amant, et n’épousera jamais Don Sanche.

Scène 6

Chimène demande au roi la permission de ne pas épouser Don Sanche et de se retirer au couvent pour pleurer son père et son amant. Le roi lui annonce alors que Rodrigue est en vie, a vaincu Don Sanche et épargné sa vie. Le roi lui dit qu’elle a assez satisfait aux exigences de l’honneur et lui ordonne d’épouser Rodrigue, puisqu’elle l’aime.

Scène 7

Rodrigue paraît pour offrir de nouveau sa vie à la vengeance de sa bien-aimée. Chimène se rend à l’ordre du roi, mais elle lui demande un délai : le mariage avec Rodrigue ne saurait suivre de si près la mort de son père. Le roi lui accorde une année, pendant laquelle Rodrigue combattra les Maures jusque sur leur territoire.

La règle des trois unités

* L’unité d’action

L’amour menacé de Rodrigue et Chimène constitue presque tout le sujet de la pièce. Cependant, la « tragédie de l’infante » est une intrigue secondaire venant se greffer sur l’intrigue principale.

* L’unité de temps – La règle des vingt-quatre heures

L’action occupe sensiblement vingt-quatre heures ainsi réparties :

– Premier jour, dans l’après-midi : querelle de don Diègue et du comte, duel de Rodrigue et du comte.

– Nuit : bataille contre les Maures.

– Deuxième jour : assemblée chez le roi.

Corneille dira dans son Examen du Cid combien cette contrainte a porté préjudice à la vraisemblance de l’intrigue :

« La mort du comte et l’arrivée des Maures s’y pouvaient entre-suivre d’aussi près qu’elles font, parce que cette arrivée est une surprise qui n’a point de communication, ni de mesure à prendre avec le reste ; mais il n’en va pas ainsi du combat de don Sanche, dont le roi était le maître, et pouvait lui choisir un autre temps que deux heures après la fuite des Maures. Leur défaite avait assez fatigué Rodrigue toute la nuit pour mériter deux ou trois jours de repos. […] Ces mêmes règles pressent aussi trop Chimène de demander justice au roi la seconde fois. Elle l’avait fait le soir d’auparavant, et n’avait aucun sujet d’y retourner le lendemain matin pour en importuner le roi, dont elle n’avait encore aucun lieu de se plaindre, puisqu’elle ne pouvait encore dire qu’il lui eût manqué de promesse. Le roman lui aurait donné sept ou huit jours de patience avant de l’en presser de nouveau; mais les vingt quatre heures ne l’ont pas permis : c’est l’incommodité de la règle. »

* L’unité de lieu

La pièce se déroule en Espagne dans le royaume de Castille à Séville, dans trois endroits différents : la place publique, le palais du roi et la maison de Chimène. Corneille a donc dévié la règle qui préconise le choix d’un lieu unique.

Lecture audio

Extraits

Acte I

Scène IV

Monologue de Don Diègue

(qui laisse éclater son désespoir et sa frustration de ne pouvoir se venger)

 

Ô rage ! ô désespoir ! ô vieillesse ennemie !

N’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ?

Et ne suis-je blanchi dans les travaux guerriers

Que pour voir en un jour flétrir tant de lauriers ?

Mon bras, qu’avec respect toute l’Espagne admire,

Mon bras, qui tant de fois a sauvé cet empire,

Tant de fois affermi le trône de son roi,

Trahit donc ma querelle, et ne fait rien pour moi ?

Ô cruel souvenir de ma gloire passée !

Œuvre de tant de jours en un jour effacée !

Nouvelle dignité, fatale à mon bonheur !

Précipice élevé d’où tombe mon honneur !

Faut-il de votre éclat voir triompher le comte,

Et mourir sans vengeance, ou vivre dans la honte ?

Comte, sois de mon prince à présent gouverneur :

 

Ce haut rang n’admet point un homme sans honneur ;

Et ton jaloux orgueil, par cet affront insigne,

Malgré le choix du roi, m’en a su rendre indigne.

Et toi, de mes exploits glorieux instrument,

Mais d’un corps tout de glace inutile ornement,

Fer, jadis tant à craindre, et qui, dans cette offense,

M’as servi de parade, et non pas de défense,

Va, quitte désormais le dernier des humains,

Passe, pour me venger, en de meilleures mains.

Acte I

Scène VI

Monologue de Don Rodrigue

(qui exprime son déchirement entre son devoir et son amour)

 

Percé jusques au fond du cœur

D’une atteinte imprévue aussi bien que mortelle,

Misérable vengeur d’une juste querelle,

Et malheureux objet d’une injuste rigueur,

Je demeure immobile, et mon âme abattue

Cède au coup qui me tue.

Si près de voir mon feu récompensé,

Ô Dieu, l’étrange peine !

En cet affront mon père est l’offensé,

Et l’offenseur le père de Chimène !

 

 

Que je sens de rudes combats !

Contre mon propre honneur mon amour s’intéresse :

Il faut venger un père, et perdre une maîtresse :

L’un m’anime le cœur, l’autre retient mon bras.

Réduit au triste choix ou de trahir ma flamme,

Ou de vivre en infâme,

Des deux côtés mon mal est infini.

Ô Dieu, l’étrange peine !

Faut-il laisser un affront impuni ?

Faut-il punir le père de Chimène ?

 

 

Père, maîtresse, honneur, amour,

Noble et dure contrainte, aimable tyrannie,

Tous mes plaisirs sont morts, ou ma gloire ternie.

L’un me rend malheureux, l’autre indigne du jour.

Cher et cruel espoir d’une âme généreuse,

Mais ensemble amoureuse,

Digne ennemi de mon plus grand bonheur,

Fer qui causes ma peine,

 

M’es-tu donné pour venger mon honneur ?

M’es-tu donné pour perdre ma Chimène ?

 

Il vaut mieux courir au trépas.

Je dois à ma maîtresse aussi bien qu’à mon père :

J’attire en me vengeant sa haine et sa colère ;

J’attire ses mépris en ne me vengeant pas.

À mon plus doux espoir l’un me rend infidèle,

Et l’autre indigne d’elle.

Mon mal augmente à le vouloir guérir ;

Tout redouble ma peine.

Allons, mon âme ; et puisqu’il faut mourir,

Mourons du moins sans offenser Chimène.

 

Mourir sans tirer ma raison !

Rechercher un trépas si mortel à ma gloire !

Endurer que l’Espagne impute à ma mémoire

D’avoir mal soutenu l’honneur de ma maison !

Respecter un amour dont mon âme égarée

Voit la perte assurée !

N’écoutons plus ce penser suborneur,

Qui ne sert qu’à ma peine.

Allons, mon bras, sauvons du moins l’honneur,

Puisqu’après tout il faut perdre Chimène.

 

Oui, mon esprit s’était déçu.

Je dois tout à mon père avant qu’à ma maîtresse :

Que je meure au combat, ou meure de tristesse,

Je rendrai mon sang pur comme je l’ai reçu.

Je m’accuse déjà de trop de négligence :

Courons à la vengeance ;

Et tout honteux d’avoir tant balancé,

Ne soyons plus en peine,

Puisqu’aujourd’hui mon père est l’offensé,

Si l’offenseur est père de Chimène.

 

Acte III

Scène V

Monologue de Don Diègue

(qui exprime son désespoir, croyant son fils tué par la vengeance de Chimène)

 

Jamais nous ne goûtons de parfaite allégresse !

Nos plus heureux succès sont mêlés de tristesse ;

Toujours quelques soucis en ces événements

Troublent la pureté de nos contentements.

Au milieu du bonheur mon âme en sent l’atteinte :

Je nage dans la joie, et je tremble de crainte.

J’ai vu mort l’ennemi qui m’avait outragé ;

Et je ne saurais voir la main qui m’a vengé.

En vain je m’y travaille, et d’un soin inutile,

Tout cassé que je suis, je cours toute la ville :

Ce peu que mes vieux ans m’ont laissé de vigueur

Se consume sans fruit à chercher ce vainqueur.

À toute heure, en tous lieux, dans une nuit si sombre,

Je pense l’embrasser, et n’embrasse qu’une ombre ;

Et mon amour, déçu par cet objet trompeur,

Se forme des soupçons qui redoublent ma peur.

Je ne découvre point de marques de sa fuite ;

Je crains du comte mort les amis et la suite ;

Leur nombre m’épouvante, et confond ma raison.

Rodrigue ne vit plus, ou respire en prison.

Justes cieux ! me trompé-je encore à l’apparence,

Ou si je vois enfin mon unique espérance ?

C’est lui, n’en doutons plus ; mes vœux sont exaucés,

Ma crainte est dissipée, et mes ennuis cessés.

 

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