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Les mangeurs de lotos… (Alfred Tennyson)

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Alfred Tennyson

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Alfred Tennyson

 

*
«Allez, courage ! » fit Ulysse ; puis il leur désigna la terre :
«Ce flot ascendant, leur dit – il, est tout prêt
De nous porter vers la grève…»

*
Dans l‘après-midi, ils accostèrent à une terre
Où l’après-midi, nuit & jour, hantait l’air…
Et d‘un e côte, jusqu’à l’autre – ô contrée calme & délétère –
Tressaillaient les brises de mer,
Comme des hommes rêvant à d’étranges
Et inquiétants mystères…
Or, là-haut, trônait l’astre lunaire,
Sorte d’œil blanc, loin au-dessus de la vallée-et, telle une volute à l’envers,
S’écoulait la rivière, frêle en son lit d’argent :
Qui le long du coteau, tombant et s’arrêtant
Tombant et s‘arrêtant, y glissait doucement…

Ô terre de rivières ! – d’aucunes pareilles à des volutes à l’envers,
Comme d’oublieuses traînes de mariées,
S’échevelaient de mont en val ;
Mais d’autres, en d’éclatants jeux d’ombre & de lumière,
S’effondraient, léthargiques, en contrebas,
Où elles se muaient en voile d’écume…
Et eux, les Marins, s’approchant de la grève,
Ils les virent, ces rivières, de l’intérieur des terres,
Fluer vers la mer ; et là – haut,
Ces trois sommets,
Ô pinacles d’éternelle blancheur !

Qui s’élevaient,
Et restaient figés, là – bas,
Hiératiques et glacés,
Et couronnés, à la brune,
D’une auréole pourprée ; et , perlés d’eau de pluie-
S’élançaient ces pins sombres,
Vers le haut du coteau;
Loin, loin au- dessus des fourrés ensauvagés.
Et Phébus, enflammé, au – delà s’effondrait
Dans l’Ouest rougeoyant ; et là – bas,
Par mille percées à travers monts,
S’entrevoyait le vallon, loin à l’intérieur des terres ;
Et la blonde colline, aussi,
Bordée de maints palmiers…
Et des vaux, & des prés tortueux ;
Semés, tout le long,
De tiges de galanga ! Ô terre de splendeurs,
Où toute chose, nuit et jour,
Semblait toujours la même !
Mais alors, tout autour de la nef,
Leurs faces pâles, sombres & pâles dans ce crépuscule rougeoyant,
Ils arrivèrent, tristes & accueillants,
Les Mangeurs de Lotos aux doux yeux de sommeil..

Et de la tige enchantée,
Maints rameaux portaient – ils,
Tout gorgés de fleurs & de fruits ; et d’en offrir, à chacun d’entre eux,
Mais quiconque y goûtait, aussitôt divaguait…
Et la vague, à l’autre rive,
Semblait soudain gémir et rêver
Sur des rives éloignées ; aussi, si l’un de ses frères
Lui parla it,
Tout à coup sa voix – jadis belle & forte –
Semblait vague & lointaine,
Comme une voix d’outre – tombe…
Puis il semblait – l’initié – triste & ensommeillé,
Quoiqu’étrangement éveillé ;
Comme vibrait, à ses tempes,
Le rythme lancinant de ses veines…
Alors, ce soir – là, ils les invitèrent à s’asseoir,
Sur l’arène dorée ;
Là, nus sur la grève,
Entré Phébus et Phoëbé :
Et qu’il était doux, ce soir, enivré de Lotos,
De rêver à la patrie aimée – aux enfants, aux épouses,
Et aux esclaves dévoués ! Mais surtout,
Surtout et avant tout, pour toujours & jamais,
Que triste était la mer, et triste la pagaie !
Ô triste les champs d’eau, stériles & éreintants…
Alors, l’un d’eux a dit : «Allons, fi de l’écume ! »

Et eux, aussitôt, de chanter tous en
Chœurs : «Il est loin, loin au – delà du flot,
Notre îlot natal! Allez, oublions donc ;
Que nous chaut l’aviron ?»

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