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V9V – Rentrée scolaire

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Salvador Dali

Salvador Dali

Rentrée scolaire

Je n’ai plus le cœur à rire, mon bel oiseau-lyre s’est évadé loin des bancs de l’école. Ce matin, il a pris son envol, dédaignant les quelques grains disposés à ses pieds. Il s’est élevé au-dessus des pics enneigés, là-haut dans l’air pur qui ne connait que l’azur. Loin de moi et de mes émois, ignorant solitude et devoirs d’études. Et ce ne sont pas les nuages caramélisés qui feront fondre mon anxiété : sous la pluie, se morfond l’ennui de mon ardeur éplorée d’avoir perdu sa liberté.

Traitre maître qui tous les ans revient, tel l’assassin sur les lieux de son crime ! Rentrée rime avec dictée. Plus question de rêver, ni de jouer. Pour quelle raison devoir se plier et non pas s’émanciper ?  Avalanche d’ordres donne envie de mordre. On nous broie, nous formate et voudrait que l’on soit social-démocrate, gentil esclave acceptant ses entraves, ne doutant point des besoins que nous impose la glose des bien-pensants, nos dirigeants.

Je ronge mon frein, songe à demain. Je ne suis pas un couard. Plus tard, je serai pirate. À bord de ma frégate, courage et partage seront mes compagnons. Sans faire dans les discours, nous volerons au secours des opprimés et des âmes blessées. Se replier, échapper à la haine qui enchaîne sera un jeu d’enfant sur le vaste océan. Il y aura une île, une anse tranquille, qui sera notre refuge face aux juges décérébrés peuplant les cités. Sur le mat du bateau, nous planterons le drapeau de Libertalie, nouvelle colonie où les hommes sont égaux et pleins d’idéaux.

Sur mon pupitre, encore un chapitre de connaissances sans consistance. Les mots se mélangent aux fils des anges. Une toile se tisse. Une voile se hisse. Et bientôt, au fil de l’eau, loin de mes camarades, je pars en escapade rejoindre la vie et ses défis. Mon rêve est plus palpable qu’un élève dans son étable. Ruminer des heures durant des pensées d’auteurs d’antan n’est pas de mon ressort. C’est une petite mort. Savoir, c’est bien. Croire, nettement moins.

Que de temps gaspillé à l’examen de médiocrités ! L’on m’aurait donné à réciter la table des possibles pour me rendre capable et sensible dans un monde qui corresponde à la structure de ma nature, j’aurais appris. Et compris. Qu’importe toutes ces portes cadenassées, je veux les clefs ! Uniquement les clefs, et pas les porte-clefs. Et s’il n’y en a pas, comment les forger. Avancer pas à pas, mais sans filet. Sentir, vibrer. Devenir assuré de sa personne quelle que soit la donne. Mais c’est trop demander à des pontes engoncés dans des principes qui participent à l’éducation de la soumission…

Je n’ai plus le cœur à sourire. Mon bel oiseau-lyre s’est enfui dans la nuit qui nous rattrape et, sur nous, referme la trappe.

V9V, tous droits réservés

***

Petit Paul

Petit Paul, tu sais,
J’ai vu un jour les baleines danser avec les flots
Et leurs contours de sirènes trancher le bleu des eaux…
J’ai vu,
J’ai vu tant de merveilles
Mais plus rien n’est pareil…
Petit Paul, je sais,
Pour toi, l’océan n’est que ces réserves à poissons
Qui dévorent nos plastiques en faisant les yeux ronds…

Petit Paul, il faut que je te dise :
Que la leçon est loin d’être apprise ;
On peut toujours faire pire
Quand on cherche à détruire…

Petit Paul, tu sais,
J’ai vu des flèches d’un blanc éclatant sous le soleil
S’élancer dans les nuages afin de gratter le ciel…
J’ai vu,
J’ai vu tant de merveilles
Mais plus rien n’est pareil…
Petit Paul, je sais,
Pour toi, le béton empile des cages d’appartements
Où les enfants s’ennuient et mûrissent en délinquants…

Petit Paul, il faut que je te dise :
La leçon n’a pas été comprise ;
On peut toujours faire pire
Quand on cherche à détruire…

Petit Paul, tu sais,
J’ai eu les cheveux dans le vent, que la vitesse grise,
Sur des géants d’acier que des chants de fureur attisent…
J’ai vu,
J’ai vu tant de merveilles
Mais plus rien n’est pareil…
Petit Paul, je sais,
Pour toi, la fougue est soumise au temps, du matin au soir,
Car demain, rentabilité sera ton seul devoir…

Petit Paul, il faut que je te dise :
Que la leçon doit être reprise ;
On peut toujours faire pire
Quand on cherche à détruire…

Petit Paul, tu sais,
J’ai vu des pays colorés en parfums exotiques
Qui ensorcellent les sens dans une étrange musique…
J’ai vu,
J’ai vu tant de merveilles
Mais plus rien n’est pareil…
Petit Paul, je sais,
Pour toi, le monde est sang et or, et mort assurément,
La seule magie qui envoûte est issue de l’argent…

Petit Paul, il faut que je te dise :
Dans la leçon il y a méprise ;
On peut toujours faire pire
Quand on cherche à détruire…

Petit Paul, tu sais,
J’ai vu des champs dorer les blés pour des nids d’alouettes,
Qui s’envolent dans l’été, poussées par la chansonnette…
J’ai vu,
J’ai vu tant de merveilles
Mais plus rien n’est pareil…
Petit Paul, je sais,
Pour toi, les jardins se cachent sous serres aseptisées ;
Les fruits, le pain sortent des rayons du supermarché…

Petit Paul, il faut que je te dise :
Que cette leçon est sans surprise ;
On peut toujours faire pire
Quand on cherche à détruire…

Petit Paul, tu sais,
J’ai fait ce que j’ai pu pour rendre le monde meilleur.
J’y ai cru, j’ai rêvé. C’était compter sans les tueurs…
J’ai vu,
J’ai vu tant de merveilles
Mais plus rien n’est pareil…
Petit Paul, je sais,
Pour toi, la tâche est compliquée. L’héritage à gérer
Laisse peu d’alternatives pour être redressé…

Petit Paul, il faut que je te dise :
Sur toutes les leçons, tu as prise ;
Tu peux freiner le pire
Pour ne pas tout détruire…

Petit Paul, il faut que je te dise :
Sur toutes les leçons, tu as prise ;
Tu peux freiner le pire,
Et le futur écrire…

V9V, tous droits réservés

Publié par online-litterature

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